PRIX ACTUARIAT SCOR Jeunes Docteurs
Cet article est basé sur la thèse de doctorat « Risque systématique dans les contrats d’assurance viagers », de Hamza Hanbali, présentée à la Katholieke Universiteit Leuven (KU Leuven) en septembre 2019.
L’un des objectifs de cette thèse est d’analyser différents mécanismes d’actualisation des primes d’assurance hospitalisation viagers, et d’évaluer leurs conséquences en termes de discrimination fondée sur l’âge. Deux composantes sont nécessaires pour la mise en place d’un mécanisme d’actualisation des primes. Il faut, d’une part, définir une méthode de calcul d’un indice médical conduisant à des accroissements homogènes au niveau du secteur. D’autre part, il faut établir une formule d’indexation intégrant l’équilibre actuariel. L’un des défis du calcul de l’indice médical réside dans l’hétérogénéité des garanties offertes par les contrats privés d’assurance hospitalisation. Un même contrat peut couvrir les hospitalisations en chambre privée ou partagée. Ces catégories sont sujettes à inflations médicales différenciées. Il est donc nécessaire de construire les indices médicaux et de les attribuer à chaque contrat de manière adéquate. De plus, les indices doivent refléter l’évolution du coût des soins de santé au niveau sectoriel. Le but de cette contrainte, imposée par le législateur belge, est de distinguer le risque systématique commun au secteur, des variations individuelles des assureurs. La formule d’actualisation des primes doit, elle, tenir compte de l’impact de l’inflation médicale sur les primes futures ainsi que sur les réserves. L’indexation se déclinerait donc sous différentes versions. Elle peut être implémentée individuellement pour chaque contrat d’assurance ou collectivement en mutualisant le risque des nouveaux entrants d’une même année indépendamment de leur âge. Il est important de comparer ces différentes combinaisons car elles peuvent impacter la finalité du dispositif viager. L’association belge de protection des consommateurs Test-Achat a exprimé son inquiétude face à cette méthode. Son argument est que l’actualisation individuelle peut mener à une hausse des primes ciblée, rendant caduque l’objectif initial de protéger les assurés vulnérables.
Discrimination fondée sur l’âge
L’évaluation des conséquences de la mutualisation suggère que les formules d’actualisation basées sur la solidarité intergénérationnelle favoriseraient les assurés les plus jeunes, au détriment des plus âgés. En effet, l’indexation tient compte de l’évolution des réserves qui dépendent, elles-mêmes, de l’âge de l’assuré. Ainsi, dans ce système de mutualisation des risques, les nouveaux entrants âgés pourraient payer pour l’inflation médicale des jeunes assurés, pour lesquels une réserve substantielle a déjà été constituée. Contre-intuitivement, et malgré les critiques essuyées par les associations de protection des consommateurs, la formule d’actualisation individuelle pourrait être optimale. L’analyse suggère donc qu’un système d’indexation dans un cadre viager ne suffit pas à garantir l’accessibilité des contrats d’assurance hospitalier. Il faut s’interroger sur les solutions qui amélioreraient ce système. L’une d’elle requerrait l’intervention du régulateur, mais celle-ci pourrait entraver la liberté tarifaire des assureurs, comme l’a relevé la décision de la Cour de Justice Européenne du 26 janvier 2012 contre la Slovénie. Une autre solution consisterait à autoriser le transfert des réserves lorsque l’assuré change d’assureur. Ce système s’apparente à celui adopté en Allemagne. Cependant, dans cette hypothèse, des problèmes d’anti-sélection pour l’assureur pourraient se poser. Si les jeunes assurés en bonne santé quittent le portefeuille, le risque de l’assureur augmenterait, nécessitant des augmentations de primes pour les assurés restants, et aucune des parties contractantes ne bénéficierait de cette spirale qui se mettrait en place.