Fin 2019, la mobilisation pour une agriculture bio s’emballe. Révoltées par l’inaction des gouvernements, les jeunes générations entament des grèves de la faim. En Europe, un plan de transition agroécologique est lancé. Dix ans plus tard, visite chez Lucile et Raphaël, qui cultivent pommes et courgettes…
Entre chaque rangée de pommiers, des bandes fleuries aux tons blancs, violets et surtout jaunes égayent le verger. Lucile, la maîtresse des lieux, les couve d’un regard… technique. « Ces fleurs ne sont pas là pour faire joli, mais pour héberger ce qu’on appelle les auxiliaires, les insectes prédateurs de ceux qui ravagent nos pommiers. » Couleurs et formes des pétales, périodes de floraison… rien n’est laissé au hasard pour attirer ces précieux alliés durant toute la belle saison. Lucile pointe du doigt : « Là, ce sont des larves de chrysopes. Elles se gavent de pucerons pendant leur développement. C’est un auxiliaire préventif parfait car il s’active dès le printemps. Les larves de coccinelles prendront ensuite le relais. » Lucile a 32 ans et s’est installée comme agricultrice dans le Val de Loire il y a cinq ans, avec son mari Raphaël. En plus d’une dizaine d’hectares de pommiers, ils cultivent une trentaine de légumes de saison sur 1 hectare. Que ce soit dans le verger ou dans le potager, pas un gramme de pesticide ou d’engrais de synthèse. La politique agricole commune (PAC) revotée en 2022 leur donnait jusqu’à cette année pour y arriver.
Souvenons-nous : tout comme la mobilisation pour le climat, la mobilisation pour une agriculture biologique s’est brusquement emballée en 2019. En février, une étude sur la disparition des insectes parue dans la revue Biological Conservation (1) fait des projections terrifiantes. Un quart de la biomasse des insectes va s’éteindre dans les dix ans.