Xavier Jaravel est le lauréat du prix du Meilleur jeune économiste 2021. Pour L’Actuariel, il livre son analyse sur les scénarios de sortie de crise et expose sa vision du rôle à jouer par sa profession dans la société.
Vous vous êtes fait connaître pour vos travaux sur l’innovation et les inégalités. Pouvez-vous nous expliquer vos recherches ?
Xavier Jaravel : En France, nous avons tendance à croire que l’innovation accroît les inégalités. Nos travaux récents analysent comment ces dernières peuvent freiner l’innovation et quelles politiques publiques permettraient d’avoir à la fois plus d’innovations et moins d’inégalités. À performances scolaires égales, si vos parents sont parmi les 10 % des revenus les plus élevés, vous avez dix fois plus de chances de devenir un porteur d’innovations par rapport à quelqu’un dont les parents sont en dessous de la médiane des revenus. Il y a un important vivier d’innovateurs qui s’ignorent et qu’il faut aller chercher ! Pour y parvenir, il faut dépenser un peu : selon nos calculs, 100 millions d’euros par an injectés dans les programmes de mentorat, les ateliers dans les écoles ou les internats d’excellence feraient, à terme, gagner 5 milliards d’euros par an au pays en création de richesses supplémentaires.
Vous tordez également le cou à l’idée que la robotisation nuit à l’emploi…
Xavier Jaravel : J’ai croisé des données françaises sur les investissements des entreprises dans des technologies d’automatisation, notamment les robots, avec des informations sur la masse salariale et les chiffres liés à l’emploi. Ce travail démontre que les entreprises qui automatisent et robotisent le plus ont de meilleures dynamiques d’emploi. Elles embauchent davantage – y compris des emplois peu qualifiés –, les salaires restent stables et les effectifs augmentent.