La réglementation bancaire s’est profondément transformée depuis la grande crise financière de la fin des années 2000. Pourtant, la confiance dans la solidité du système a été ébranlée au printemps par plusieurs crises bancaires. Nicolas Véron, cofondateur du think tank Bruegel et chercheur spécialisé dans la régulation financière, revient sur ce qui fonctionne et, surtout, sur ce qui doit impérativement être amélioré.
La faillite de deux banques américaines et de Crédit Suisse a remis le risque bancaire sur le devant de la scène au printemps dernier. Quinze ans après la faillite de Lehman Brothers, peut-on dire que le cadre prudentiel bancaire né de la grande crise financière a échoué face au test de grande envergure de la hausse des taux ?
Nicolas Véron : Il est important de bien analyser les faits pour identifier ce qui a effectivement échoué. Ce ne sont pas les concepts réglementaires mis en œuvre après la crise financière de 2007-2009 qui ont été mis en échec, mais bien le système de surveillance prudentielle du système bancaire aux États-Unis. Tout d’abord, les régulateurs américains avaient décidé d’appliquer les standards internationaux de Bâle 3 à un nombre bien trop restreint de banques. Mais ce qui surprend surtout, c’est le peu d’attention porté par les autorités de supervision au risque de taux alors même que celui-ci était en train de se matérialiser. La faillite de la Silicon Valley Bank (SVB) n’est pas le résultat d’une crise de liquidité artificielle, mais bien la conséquence d’un modèle d’affaires qui n’était tout simplement pas viable, ce qu’auraient dû voir les autorités de surveillance. Le débat – légitime – sur les lacunes de la réglementation prudentielle américaine ne doit donc pas effacer la responsabilité des autorités dont le rôle, au-delà du contrôle des exigences en capital, est aussi d’exercer leur jugement en matière de viabilité des établissements. C’est le principe du « pilier 2 » de la réglementation prudentielle, sur lequel les États-Unis insistent traditionnellement peu, pour des raisons juridiques, judiciaires et politiques, qui doit faire l’objet d’une réflexion.