Trop centré sur la croissance et pas assez sur le social ou le développement durable, le PIB est accusé de ne donner qu’un reflet partiel de la situation d’un pays. Malgré les critiques, il continue toutefois de s’imposer comme l’alpha et l’oméga des politiques publiques. Si d’autres indicateurs ont vu le jour, aucun ne semble taillé pour le remplacer.
Si les premiers travaux d’estimation du revenu national remontent au XVIIe siècle, c’est surtout après la grande crise de 1929 que le sujet fait l’objet de recherches plus approfondies. Aux États-Unis, l’économiste Simon Kuznets y travaille notamment pendant l’entre-deux-guerres et défend l’idée d’un revenu national devant avant tout être une mesure du bien-être. L’homme, souvent présenté à tort comme le principal architecte du produit intérieur brut (PIB), ne parvient toutefois pas à imposer sa vision lors de la mise en place de la comptabilité nationale pendant la Seconde Guerre mondiale et après. En effet, dès l’origine, le PIB a été conçu comme une mesure de l’activité économique et de la production, et non comme un indicateur de bien-être. Il prend toutefois une si grande ampleur qu’il en vient à être assimilé comme tel, surtout dans le contexte des Trente Glorieuses, où l’accroissement de la production se traduit par une amélioration du niveau de vie de la population. Ce n’est qu’à la fin des années 1960 que jaillissent les premières critiques. En 1968, peu de temps avant son assassinat, le sénateur américain Robert F. Kennedy regrette ainsi que le PIB tienne compte de « la pollution de l’air, de la publicité pour le tabac (…) et du coût des prisons », mais pas « de la santé de nos enfants, ni de la qualité de leur instruction ».
Développement durable, le grand absent
Au début des années 1970, les économistes américains William Nordhaus et James Tobin proposent, dans un article intitulé « La croissance est-elle obsolète ? », une « mesure de bien-être économique » qui exclut les éléments non générateurs de bien-être (trajets domicile-travail…) et intègre ceux qui y contribuent mais ne sont pas comptabilisés dans le PIB (travail domestique, bénévolat…).