Branko Milanovic met en lumière les défis politiques de nos sociétés à travers l’analyse des inégalités mondiales et un mode de lecture novateur.
Pourquoi avoir décidé de vous intéresser aux inégalités au niveau mondial ?
Branko MILANOVIC : Se pencher sur les inégalités mondiales, c’est se pencher sur l’histoire économique du monde. Leurs évolutions reflètent l’émergence, la stagnation et le déclin économique de certains pays, et, à l’échelle nationale, elles témoignent du passage d’un système social ou d’un régime politique à un autre et nous permettent de voir à quel point le monde a changé. Je travaillais sur les inégalités depuis longtemps lorsque j’ai choisi de travailler avec un prisme mondial. Dans les années 1990, j’étais économiste en chef de la Banque mondiale et j’ai réalisé que nous disposions d’un nombre incroyable d’enquêtes sur les revenus des ménages. Seule la Banque mondiale donnait accès aux données de certains pays comme la Birmanie, le Nigeria, le Soudan ou l’Algérie, et c’est encore le cas aujourd’hui… En les assemblant, j’ai pu observer le monde comme s’il s’agissait d’un seul pays ! Penser d’une manière très globale était absolument nouveau à l’époque.
Leur étude à l’échelle mondiale est-elle aujourd’hui une nécessité ?
Branko MILANOVIC : C’est indispensable pour plusieurs raisons. Premièrement, nous pensons de manière plus globale que par le passé. Certes, notre intérêt principal reste l’État nation – ce qui arrive au sein de notre pays –, mais la mondialisation nous sensibilise de plus en plus aux événements extérieurs. Deuxièmement, elle a de nombreux effets au niveau national (niveaux de revenus, perspectives d’emploi, etc.) et de nombreux enjeux mondiaux font aujourd’hui l’objet d’un traitement politique national. La mondialisation a changé la vision des études économiques et de questions telles que l’immigration.
Pourquoi la question de l’immigration est-elle si importante ?